LITTÉRATURE
Les poètes malgaches et leurs œuvres ont significativement enrichi la littérature francophone.
Ils sont pourtant moins largement diffusés que leurs homologues romanciers ou novellistes. En attendant que les nombreux chefs d'œuvre inédits soient enfin publiés, comment s'approprier la poésie malgache ? Par où commencer ?
Peut-être par trois des plus grands écrivains malgaches connus et reconnus :
1) Jean-Joseph Rabearivelo (1901 ou 1903-1937)
2) Ny Avana Ramanantoanina (1891-1940)
Intronisé « prince des poètes malgaches » par Leopold Senghor, couronné d’une aura de poète maudit indissociable de sa vie (nimbée d’opium et d’exils intérieurs) et de sa mort (par suicide au cyanure à 34 ans), Jean-Joseph Rabearivelo est considéré comme l’un des plus grands écrivains malgaches francophones. Il est de fait le plus connu.
Le plus lu.
Le plus loué.
Poète bilingue, dramaturge, critique, historien, il maîtrise et transcende les mouvements littéraires français du début du vingtième siècle. Son génie artistique tire parti, par exemple, de la puissance évocatrice du surréalisme pour exprimer les subtilités de l’âme malgache.
Son travail de traduction des grands auteurs occidentaux en malgache – et inversement – répond de façon décisive, pour toutes les générations à venir, à la question de savoir pourquoi la littérature malgache s’exprime en français.
Ce poète fondateur répond à cette question en expliquant que la langue de Baudelaire parle à son âme, alors que le malgache murmure à son cœur.
Autodidacte passionné, entre deux langues et deux pays, Rabearivelo aura peu connu le bonheur, mais il aura sublimé tous types de passages entre bien des mondes.
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En quelques centaines de poèmes gorgés de nostalgie et de ferveur nationaliste, Michel Ramanantoanina de son vrai nom a immortalisé (en malgache le plus souvent) des sentiments largement partagés par ses contemporains.
Plusieurs générations de Malgaches ont donc chanté, récité ses rimes introuvables en librairie, qui n’ont été rééditées que dans les années 1980.
Quelle est l’histoire de Ny Avana Ramanantoanina, ce grand oublié des sphères littéraires ? Orphelin de père et de mère, il a combattu frontalement l’occupation française et a connu l’exil aux Comores et à Mayotte, pour avoir fait partie de l’organisation indépendantiste secrète Vy Vato Sakelika.
De retour à Madagascar, privé de carrière par les colonisateurs, il a créé le mouvement littéraire Mitady ny very (Chercher ce qui a été perdu) avec J.J Rabearivelo et C. Rajoelisolo.
Le retour aux sources consiste pour lui à tourner le dos aux formes occidentales et à puiser dans les traditions littéraires (orales) malgaches.
Il faut lire ses poèmes d’amour en malgache dans le texte pour mesurer la réussite de l’ambition, et comprendre l’engouement massif et discret que ce géant suscite aujourd’hui encore.
Le grand poète malgache Jean Verdi Salomon Razakandraina, l’artiste « ami du peuple » s’est fait connaître à grande échelle en publiant dans les journaux d’Antananarivo.
Poète, peintre, dramaturge, musicien et compositeur, inscrit dans le Mouvement Mitady ny very en 1932, Dox participe par ses poèmes, 40 ans plus tard, aux révoltes des étudiants de 1972.
Le nationalisme chez lui passe par une grande attention aux détails du quotidien qui lui permettent d’exprimer les soupirs et les cris d’une population accablée de misère.
Électrisé comme ses pairs par une puissante tradition littéraire orale, le poète astrologue manie le sonnet en virtuose. Le résultat de cette hybridation offre aux écoliers malgaches qui le récitent de génération en génération de quoi structurer leurs rêves et leur attachement à leur langue maternelle et à leur identité.